Qui mange mes carottes, me demande Anaà¯s, de la Ferme de la Cure, à Sailly ? S’agit-il de la chenille du Machaon ? Car elle ne ressemble pas à celle que l’on montre dans les livres ! Voyons cela de plus près…
C’est bien une chenille de Machaon, mais elles changent d’aspect à mesure de leur croissance et de leurs mues successives. Les petites chenilles du Machaon naissent très sombres et couvertes d’épines. Plus tard, leurs picots s’atténuent, et la selle blanche au milieu du dos finit par disparaître.
Cette chenille se régalait de feuilles de Seseli gummiferum, une apiacée décorative vivace, dans une jardinière de la dalle Grand centre à Cergy. On peut observer cette chenille aussi sur le fenouil, l’aneth, le persil et aussi la rue (Ruta graveolens).
J’ai trouvé cet charmant insecte dans ma cuisine, arrivé dans l’évier avec la salade du voisin. Je l’ai gentiment déposé sur la table de jardin et il a bien voulu que je le prenne en photo. Il s’agit d’un névroptère, d’une famille voisine de celle des chrysopes, les Hemerobiidae.
Je vous présente Micromus angulatus, l’hémérobe des haies, un auxiliaire de jardin moins connu que les coccinelles, mais tout aussi efficace. Les adultes et les larves se nourrissent de petites proies vivantes, parmi lesquelles beaucoup de pucerons. Cette espèce est utilisée en lutte intégrée en maraichage pour la protection des cultures de fraises, choux, poireaux…
J’avais déjà observé un Micromus dans mon jardin, mais d’une autre espèce : Micromus variegatus, qui a la face sombre et les ailes plus contrastées. Lui aussi est un prédateur de pucerons et d’autres petits insectes.
Un nouveau venu au bord du bassin du parc François-Mitterrand à Cergy ? Je n’avais encore jamais observé cette espèce qui serait pourtant assez commune en Ile-de-France.
Hoplia philanthus, nommée hoplie floricole ou hanneton argenté, est un coléoptère de la famille des Scarabaeidae. Il est parfois considéré comme un ravageur des gazons, car sa larve, semblable à celle du hanneton des jardins, consomme les racines des graminées. Son cycle de développement s’étend sur deux années. Il semble affectionner les sols sableux.
Les adultes consomment les feuilles des bouleaux et des charmes, mais ne sont pas réputés faire de gros dégâts. Leurs griffes recourbées, d’une longueur étonnante, leur servent à s’agripper aux rameaux et aux feuilles. Ils peuvent ainsi prendre tranquillement leur repas sans se faire décrocher par le vent !
Dans le parc du château de Marcouville, Sophie, de la Ferme pédagogique de Pontoise m’a montré un vénérable marronnier en fin de vie. Il ne subsiste qu’un gros tronc creux car, victime peut-être de la foudre et de coups de vent, il a perdu toutes ses branches charpentières. L’eau de pluie s’accumule dans le tronc et suinte abondamment au niveau de fissures de l’écorce. Le manège d’une guêpe qui fait des va-et-vient près d’un suintement m’intrigue.
Surprise, ce n’est pas une guêpe mais un diptère ! Et c’est bigrement bien imité : les rayures noires et jaunes de l’abdomen, la longueur des antennes, le bout des pattes jaunes, les taches sur le thorax, et même l’allure plissée des ailes un peu fumées ! Mais ses gros yeux la trahissent. Il s’agit d’un syrphe, et même d’une espèce rare, inféodée à ce type de milieu constitué par les suintements des vieux arbres blessés. C’est là en effet que vivent ses larves qui, paraît-il, se nourrissent des bactéries qui s’y développent.
Un syrphe rare
L’espèce, en déclin certain en France, et classée menacée au niveau européen, a déjà été observée dans le Val d’Oise lors d’un inventaire des syrphes des marais de Montgeroult et de Boissy-l’Aillerie réalisé en 2006 à l’initiative du Parc naturel régional du Vexin français. Les auteurs indiquent que sur les 68 espèces de syrphes recensés, Sphiximorpha subsellis est « sans conteste l’espèce la plus emblématique rencontrée sur le site d’étude ».
J’avais observé ce joli Stratiomyidae dans mon jardin. Remarquez la forme particulière des antennes. Ses larves, qui consomment de la matière organique en décomposition, habitaient peut-être dans mon composteur.
Vu de près, ce Stratiomydae montre deux grosses épines noires sur le scutellum, juste en arrière de la partie rouge. A quoi lui servent-elles ? Je n’ai pas trouvé de réponse, il faut dire que les experts en Stratiomyidae, ça ne court pas les rues… Ce que l’on croit savoir de cette espèce, nommée Clitellaria eppiphium, se résume à peu de choses : l’espèce serait rare et sa larve vivrait dans les colonies de fourmis qui habitent le bois mort. Et justement, du bois mort plein de fourmis ce n’est pas ce qui manque au parc du château de Grouchy !
C’est l’une des formes d’Adaliadecempunctata, la coccinelle à dix points, une chasseuse de pucerons, comme beaucoup d’autres espèces dans la famille des Coccinellidae. Elle est présente en Val d’Oise, mais est peu signalée. Avis aux amateurs : il faut la chercher dans les haies champêtres et sur les chênes.
On peut rencontrer dans les arbres une autre coccinelle à dix points, mais il sera difficile de les confondre !
Le long d’une sente ensoleillée à Poissy pousse en abondance le millepertuis perforé (Hypericum perforatum). « Perforé de mille trous » nous dit son appellation vernaculaire. Mais sont-ce vraiment des trous, tous ces points clairs sur les feuilles? Non, ce sont des vésicules huileuses qui laissent un peu passer la lumière.
Cette chrysomèle noire à taches orange est très classique sur le millepertuis, il s’agit de Cryptocephalus moraei. Elle est commune mais discrète : farouche, elle se cache rapidement sous les feuilles ou derrière la tige dès qu’un individu louche approche !
Une autre chrysomèle tout aussi timide se cache sur cette plante : Chrysolina hyperici. Elle est nettement moins commune que la précédente.
Cette espèce a été introduite en Amérique du Nord pour lutter contre la prolifération dans les pâtures de notre millepertuis considéré là -bas comme une plante invasive, toxique pour le bétail.
Cette fausse chenille en revanche était facile à voir. Elle était trop occupée à manger sa feuille de millepertuis pour s’inquiéter de la présence d’un photographe. Avec une telle ligne centrale de points noirs tout le long du dos, pas de doute, c’est Tenthredo zona, une espèce peu observée, à la répartition bien mal connue. Cette année, je l’ai vue aussi près du chalet nature de l’Ile de loisirs de Cergy-Pontoise.
Ce sont toutes des plantes dont la dissémination des graines est facilitée par les fourmis. Les botanistes sérieux parlent de myrmécochorie. Leurs graines sont accompagnées d’une excroissance charnue, nommée élaà¯osome, très recherchée par les fourmis car elle est riche en protéines, en sucres et surtout en graisses, des nutriments essentiels pour la croissance de leurs larves.
Voici une capsule presque mà»re de chélidoine que j’ai ouverte pour voir les fameuses graines à élaà¯osome. Les élaà¯osomes sont ces masses blanches et luisantes qui sont accrochées aux graines brunes. A maturité les graines, avec leur élaà¯osome, sont expulsées mécaniquement.
Je décide de tenter des fourmis en plaçant ma capsule entrouverte sur une corniche dans un vieux mur en pierres, pas loin d’un de leurs lieux de passage.
Du renfort arrive bientôt : deux, trois puis quatre fourmis s’activent et extraient les graines une à une, qui prennent rapidement le chemin de la fourmilière ! La capsule aura été dévalisée en quelques minutes à peine.
Les graines de chélidoine seront abandonnées par les fourmis lorsqu’elles auront été débarrassées de leur précieux élaà¯osome. Ce mode de transport permet à la plante de coloniser des espaces inaccessibles par la simple gravité lors de la projection mécanique des graines, comme le haut des murs ou d’étroites fissures murales.
Ce coléoptère poilu et vivement coloré est le clairon des ruches. L’adulte est essentiellement herbivore. Ici, il se régale des étamines d’une fleur de ronce. Sa larve est prédatrice des larves d’abeilles dans les ruches.
En Ile-de-France, on peut le confondre avec une espèce voisine : Trichodes apiarius (le clairon des abeilles), de mœurs semblables. La différence morphologique est subtile : chez le clairon des abeilles, l’extrémité des élytres est noire, alors qu’elle est rouge chez le clairon des ruches.
Au bord de l’Oise à Vauréal, les Calopetryx splendens mâles se disputent les nénuphars dont les fleurs en bouton qui sortent de l’eau font de bons perchoirs. Celui-ci avait pris position au sommet d’une branche d’un rejet d’orme. La photo est ratée, mais elle réserve une surprise. Regardez la feuille tout en bas à gauche : elle présente une bien curieuse découpe en zigzag.
Une recherche sur internet sur les mots « tenthrède » et « zigzag » m’a fait découvrir Aproceros leucopoda, une espèce d’origine asiatique, inféodée aux ormes. Elle a été découverte en Pologne en 2003, puis signalée dans différents pays d’Europe de l’Est ; elle est arrivée en Belgique en 2013.
Une nouvelle espèce pour l’Ile-de-France ?
La tenthrède zigzag de l’orme a été observée pour la première fois en France en mai 2017 dans le Nord, près de la frontière belge. Sa présence a été attestée dans l’Oise le 31 mai 2018.
Mon observation est peut-être la première pour cette espèce en Ile-de-France. Voilà un insecte qui semble bien se moquer du réchauffement climatique : il nous arrive par le Nord !
Les suivis de ce ravageur invasif en Allemagne ont montré que l’espèce s’attaque aussi aux cultivars résistants à la graphiose. Apparemment cette tenthrède est capable de défolier complètement les ormes en fin de saison ! Ils n’avaient pas besoin de ça.