Bravo à tous ! Vous avez été très nombreux à reconnaître une pézize, et plus particulièrement la pézize écarlate, et même à donner son nom scientifique Sarcoscypha coccinea. Celle-ci m’a été ramenée par une collègue en intervention dans le Bois de Cergy au début de l’année dernière.
Il s’agit bien d’une pézize écarlate à ne pas confondre avec la pézize orangée.
La pézize écarlate, comme son nom l’indique, est d’une couleur rouge franche sur sa partie interne. Elle ressemble à un emballage de Babybel comme on me l’a justement fait remarquer. Sa face extérieure est plus claire, voire blanche quand le champignon est un peu âgé. Elle pousse sur du bois mort, essentiellement en hiver. On la voit beaucoup en cette période (janvier, février).
La pézize orangée est plus uniforme, sur des teintes orange. Elle pousse directement dans le sol et plutôt à l’automne.
Ces deux espèces sont réputées comestibles, mais sans grand intérêt culinaire. En tous cas, pour nous. Certains d’entre vous ont repéré que notre champignon avait été grignoté par un escargot ou une limace qui a eu l’air de la trouver à son goà»t !
Il a une allure étrange ce champignon avec toutes ses mèches blanches. C’est le coprin chevelu, Coprinus comatus.
Sa chevelure est assez commune dans la région. Il pousse dans les sols riches des prés, friches, sous-bois et bords de route.
Il a une odeur faible et une saveur assez douce. Il est réputé être très bon en omelette. Mais méfiance, la prudence est de mise quand il s’agit de cueillette de champignons. Coprinus comatus ressemble à certaines autres espèces du mêmes genre : Coprinus sterquilinus a la même allure mais pousse sur le fumier (d’ailleurs Coprinus vient du grec Kopros qui signifie « excrément ») ou Coprinus levisticolens qui lui sent la chicorée.
Sources :
Le guide des champignons, France et Europe par Guillaume Eyssatier et Pierre Roux
Je l’ai repéré de loin ! Le tronc d’un gros saule blanc cassé par une tempête est envahi par le polypore soufré, un champignon aux couleurs et aux formes exubérantes.
Février 2020, au même endroit
Trois ans et demi plus tard, j’ai retrouvé le gros arbre cassé et le champignon est toujours présent. Mais il a perdu de sa superbe, ses couleurs ont passé et des morceaux sont tombés au sol.
Des locataires, on dirait ?
Les frondes de polypore présentent de nombreuses galeries. Mais qui donc habite là ? Je décide d’en éplucher un morceau, à la recherche des habitants. La consistance est tendre, friable et presque crémeuse. On en mangerait presque…
Ma première rencontre est un Pediacus, un tout petit coléoptère forestier de la famille des Cucujidae, famille dont j’ignorais même l’existence. Il paraît que c’est un prédateur de larves. Pour un prédateur, il n’est pas bien vif ! Il faut dire que ses proies potentielles dans le champignon ne sont pas mobiles.
Un moucheron émerge entre mes doigts, il explore quelques instants le dessus de ma main avant de s’envoler. C’est un membre de la famille des Mycetophilidae, dont les larves sont mycétophages, comme leur nom l’indique.
à‡a y est, je crois que je tiens les responsables des trous à la surface du polypore. Ces petits coléoptères noirs sont rangés à la queue-leu-leu dans leur galerie.
Il s’agit d’une petite rareté, Eledona agricola. Cet insecte de la famille des Tenebrionidae est inféodé au polypore soufré.
Un autre insecte, furtif et fusiforme, se trémousse, galope et se cache sans cesse. Pour pouvoir le photographier, je le capture en douceur et le place dans un pot en verre. Les parois sont glissantes, il ne peut plus m’échapper ! Je profite d’une petite pause pour lui tirer le portrait avant de le relâcher. Cette jolie petite espèce est un staphylin, il s’agit de Tachyporus formosus. C’est sans doute aussi une espèce mycétophage.
Je ne regrette pas mon exploration à l’intérieur de ce champignon, qui m’a réservé de bien belles surprises. Je crois que je vais maintenant lorgner sur d’autres espèces de champignons de souche, il y a tant à découvrir !
Qu’est-il donc arrivé à ces feuilles d’érables, qui se sont parées de taches noires ?
La tache goudronneuse de l’érable
Le responsable de ces figures sphériques n’est pas un artiste contemporain, ni un tatoueur, mais un champignon inféodé aux érables. Les taches sont en réalité des stromas, organes indépendants permettant la production de spores qui assurent la dispersion du champignon.
Ce champignon possède deux formes : Melasmia acerina, une forme asexuée (immature) dite « anamorphe », et Rhytisma acerinum, une forme sexuée (mature) dite « téléomorphe » que le champignon atteindra après maturation au printemps. C’est uniquement sous sa forme sexuée que le champignon pourra libérer ses spores contaminants et venir se loger sur les jeunes feuilles en mars-avril.
Inoffensif pour l’arbre
Les taches peuvent causer une chute prématurée des feuilles mais elles ne représentent pas un danger pour l’érable, celui-ci vit très bien avec.
Pour lutter contre sa propagation, il est conseillé d’évacuer les feuilles mortes du pied de l’arbre. Ainsi, le champignon ne pourra pas contaminer la prochaine génération de feuilles.
Lors de notre dernière sortie à la plaine des Linandes de Cergy, près du village des Schtroumpfs, nous avons observé ces petits nids d’oiseaux. Cela nous a cependant surpris car ceux-ci étaient minuscules, abondants, et leurs œufs étaient disposés dans un désordre sans nom. Quel genre d’oiseau laisserait ses œufs à l’abandon de la sorte ? Serait-ce là l’œuvre des petits êtres bleus ?
La réalité est encore plus surprenante à mes yeux : il s’agit de Cyathus olla, un champignon à l’allure peu commune que l’on retrouve souvent sur les paillages de BRF (Bois Raméal Fragmenté).
Les petits « œufs » que vous voyez dans les coupoles sont en réalité des péridioles, les organes de fructification du champignon. Lorsque le temps est pluvieux et qu’une goutte d’eau tombe dans la coupole, les œufs sont expulsés à plus ou moins longue distance du nid.
Après un atterrissage hasardeux, le péridiole s’accroche à son nouveau support (plante, roche, meuble de jardin…) à l’aide d’un fil gluant. Il pourra par la suite libérer ses spores et ainsi assurer la dispersion de l’espèce.
A Cergy, ce sont des centaines de champignons qui parsèment la pelouse du Parc des Arènes. A croire que toute une colonie de Schtroumpfs y a élu domicile et installé des maisons-champignons ! Heureusement, notre experte en mycologie Marie-Louise nous a proposé une réponse plus rationnelle. Il s’agit d’un champignon très commun en cette période : la volvaire gluante.
Volvariella gloiocephala, la volvaire gluante
Ce champignon assez commun de mai à novembre se rencontre fréquemment en ce moment. Sans doute que les dernières pluies lui ont permis de se développer rapidement. De plus, il apparaît être un champignon fortement nitrophile, il pousse sur les substrats très riches en azote (pailles en décomposition, champs et pelouses fertilisés, tas de compost, pâtures). Il est possible que lors du récent aménagement du parc la terre apportée ait été fortement enrichie (en compost par exemple) permettant à la volvaire de s’exprimer de la sorte.
Gluante, c’est le cas de le dire
L’un des critères permettant de déterminer cette volvaire est l’aspect gluant de son chapeau en temps humide. Après les pluies matinales auxquelles nous avions échappé de peu, cette caractéristique était bien visible.
Des jeunes et des vieux
Dans ce champ de volvaire, il y avait tous les stades de développement du champignon. En effet, il présente un chapeau conique au début de sa pousse (à gauche sur la photo) qui s’aplatit au fil de sa croissance pour présenter un plateau avec un mamelon central à maturité (à droite sur l’image).
Un peu moins originale que l’hypothèse d’une invasion de Schtroumpfs, la détermination de Marie-Louise est pourtant plus convaincante. Merci !
L’automne est la saison des champignons de forêt. Il est vrai qu’il est fort agréable de cuisiner une omelette aux cèpes que l’on a soi-même ramassés en forêt. Mais gare aux mauvaises récoltes ! Le monde des champignons est aussi fascinant que dangereux. On comptabilise plus de 500 intoxications dues aux champignons cette saison. Pour la cueillette, faites-vous accompagnez d’un expert.
Par exemple, chez les cèpes, champignons du groupe Boletus, il existe plus d’une cinquantaine d’espèces référencées dans l’INPN, mais toutes ne sont pas présentes sur le territoire de Cergy-Pontoise. Parmi les plus communes un certain nombre sont toxiques. Attention à ne pas confondre le cèpe de Bordeaux (Boletus edulis), à l’honneur de toutes les cueillettes, avec l’un de ses cousins aux effets désagréables.
Voici quelques-uns des faux-amis à ne pas inviter à sa table.
Boletus satanas
Le bolet de Satan… Son nom est suffisamment évocateur, mieux vaut le laisser à la limace qui grignote son pied. C’est sans doute le bolet qui a la plus grande réputation de champignon toxique. La couleur rouge du pied associée à l’aspect globuleux du chapeau sont de bons indicateurs de l’espèce. Il est, de plus, plutôt rare, une raison supplémentaire pour le laisser en forêt.
Attention : les tubes (partie inférieure du chapeau) sont rouges à maturité mais jaunes au début du développement.
Boletus luridus
Le bolet blafard a la forme caractéristique des champignons du genre Boletus : un chapeau hémisphérique sur un gros pied. Mais, à la différence du cèpe de Bordeaux qui a un réseau de mailles blanches sur le pied, le bolet blafard est réticulé de rouge. Là encore, mieux vaut passer son chemin, il est toxique.
Boletus felleus / Tylopilus felleus
Ce bolet amer est ici déjà un peu vieux. Avec le temps les champignons du genre Boletus voient leur chapeau, hémisphérique au début du développement, se retourner pour former un plateau, leur donnant un tout autre aspect. Il se différencie du Cèpe de Bordeaux par le réseau de son pied aux mailles plus grandes et plus foncées et par ses pores, bien visibles dans cette configuration, qui tirent sur le rose, alors que ceux de Boletus edulis verdissent en vieillissant. Sa forte amertume le rend inconsommable.
Quoi qu’il arrive, avec les champignons, la prudence est de mise. Pensez à examiner un à un tous les champignons de la récolte et surtout, ne consommez que ceux pour lesquels vous êtes certains de votre détermination.
Scène macabre pour les criquets dans cette prairie de l’Essonne.
En travaux pratiques lors d’une formation de botanique, je parcours la prairie pour en inventorier les plantes avec le reste du groupe. Quelle n’a pas été notre surprise de découvrir au sommet de ce séneçon de Jacobée (Jacobaea vulgaris) un criquet mort, dans une posture des plus incongrues. D’autant plus surprenant que son cas n’est pas isolé. Dans toute la prairie des centaines de criquets ornent le sommet des plantes !
Qui est le coupable ?
Heureusement, le suspens ne dure pas longtemps. Les formateurs ont déjà observé ce phénomène dans la même prairie les années passées et ont pu creuser la question. Le coupable est un champignon : Entomophaga grylli. Comme son nom l’indique (entomo = insecte, phaga = manger, grylli = de la famille du grillon) ce champignon est un mangeur d’insecte qui se spécialise dans la consommation de criquets.
Son mode de chasse est très particulier. Lorsqu’un criquet est infecté par une spore, le champignon prend le contrôle de l’insecte. Le criquet monte, difficilement, au sommet d’une plante où il meurt, mangé par le champignon qui se développe à ses dépens. Il devient alors une véritable réserve de spores de champignon. Sur son promontoire, bien exposé au vent, le pauvre criquet est alors un très bon diffuseur de spores et infecte toute la prairie.
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En cette Journée Nationale de l’Audition nous vous avons préparé un sujet sur les oreilles. Non pas celles qui servent à entendre le réveil du printemps et les oiseaux chanteurs mais les oreilles que vous pouvez observer sur les arbres si vous vous promenez en sous-bois en ce mois de mars. Il s’agit bien entendu de champignons !
Les oreilles dans le lexique botanique
Lorsque des végétaux ont des organes aux formes arrondies, il arrive souvent que leur nom d’espèce soit auricula ou auriculata comme pour la scrophulaire à oreillettes : Scrophularia auriculata,dont les fleurs ressemblent à des oreilles de souris. Pour ces champignons, c’est le genre lui-même qui s’appelle « oreille » ! Plusieurs espèces sont regroupées sous le genre Auricularia.
Deux oreilles pour les feuillus
On connait au moins 6 espèces de champignons Auricularia mais seulement deux d’entre-elles sont présentes en àŽle-de-France, et nous les avons toutes les deux vues à Vauréal et à Osny. Il s’agit de l’oreille de Judas (Auricularia auricula-judae) et de l’oreille poilue (Auricularia mesenterica).
Ces deux espèces sont lignivores. Elles consomment principalement le bois des feuillus avec chacune leur régime préférentiel : on rencontre plus souvent Auricularia mesenterica sur les frênes et les érables, et Auricularia auricula-judae sur les sureaux. Les deux champignons ont, comme leur nom l’indique, une forme plus ou moins évidente d’oreille et une chair gélatineuse. Ils fructifient tous les deux à la même période : à la fin de l’hiver et début du printemps. Heureusement, leurs aspects permettent de les différencier.
A feutre ou à poils ?
L’oreille de Judas, Auricularia auricula-judae, a un aspect lisse et légèrement feutré.
L’aspect feutré de l’oreille de Judas se voit mieux lorsque que le champignon est sec.
L’oreille poilue, Auriculia mesenterica a, quant à elle, la face supérieure toute hérissée de poils.
Vous pouvez maintenant dormir sur vos deux oreilles, vous êtes capables de les différencier ! Et surtout, n’oubliez pas, les oreilles sont au cœur de votre santé !
Qui a dit « Les champignons, c’est uniquement en automne » ? Un groupe de membres de l’association Chemins et Rencontres d’Eragny-sur-Oise est venu prouver le contraire au parc du château de Grouchy mercredi 6 mars 2019, sous la houlette de Marie-Louise Arnaudy, mycophile expérimentée.
Les nombreux troncs morts et tas de bois au bord des chemins ont permis de faire de belles observations de champignons spécialistes de ces milieux :
Ce champignon réputé comestible ressemble beaucoup à un faux frère très toxique : méfiance ! En cliquant sur la photo, on peut vérifier l’aspect finement velouté du pied.
Le chapeau de la tramète versicolore présente des variations de gris et de noir, parfois avec du bleu. Chez les tramètes, le dessous du chapeau est percé d’une multitude de pores de petite taille.
Les rhizomorphes, filaments indurés de mycélium, sont partis à l’assaut d’un vieux tronc mort de peuplier, juste sous l’écorce. Il paraît que quand il est jeune ce mycélium est bioluminescent !
Fragile et gracieux, le coprin micacé pousse en touffes serrées sur le bois mort et les vieilles souches. Il doit son nom aux peluches d’aspect micacé qui ornent son chapeau. En vieillissant ce champignon noircit beaucoup.
L’examen de troncs tombés a permis de rencontrer quelques habitants du bois pourri cachés sous les écorces : la rhagie inquisitrice, un carabe, le petit silphe noir, une larve de tipule, des cloportes, des diplopodes, des collemboles sauteurs, des iules nonchalantes et d’autres mille-pattes.
Les Polydesmidae sont des diplopodes : ils ont deux paires de pattes par segment.
La rhagie inquisitrice est un longicorne inféodé au bois mort des conifères. On trouve facilement l’adulte sous les écorces d’épicéa en hiver.