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Les corneilles noires

La corneille noire, Corvus corone © CACP – Emilie Périé

J’ai récemment lu un livre que j’aimerai vous conseiller, il s’intitule Vivent les corneilles, un plaidoyer pour une cohabitation raisonnable et il est écrit par Frédéric Jiguet, chercheur au Museum national d’Histoire Naturelle.

Le titre est assez transparent, il s’agit de parler de corneilles et de détricoter un peu les raisons qui poussent à les considérer comme des ESOD (des espèces susceptibles d’occasionner des dégâts) et qui entrainent des actions de destruction volontaire de ces oiseaux.

La corneille noire, Corvus corone © CACP – Emilie Périé

Mal-aimés, ces « oiseaux de malheur » n’ont pas bonne réputation. Mais que leur reproche-t-on au juste ? Au delà de la simple superstition, il semblerait que quatre griefs leur soient attribués : elles fouillent et répandent les poubelles sur l’espace public, elles mangent les semences agricoles, elles arrachent les pelouses et elles attaquent les passants. Coupables ou innocentes ? Et si les accusations sont fondées, comment cohabiter avec ces oiseaux si communs autour de nous ? Ce sont les questions auxquelles Frédéric Jiguet apportent des premières réponses dans son ouvrage sorti en début d’année.

Corneille noire baguée « blanc 003 » © CACP – Gilles Carcassès

Pour cela il a commencé à étudier de près les corneilles parisiennes en 2015. Et qui dit étude du comportement des oiseaux dit bague d’identification. Ainsi plusieurs centaines de corneilles ont été baguées depuis le début de l’étude. En visite au jardin des plantes de Paris cette même année 2015 Gilles avait d’ailleurs croisé « blanc 003 » aussitôt rebaptisée Agent 003. En bon observateur il avait de suite averti le chercheur de sa découverte. Pour information, 9 ans plus tard « blanc 003 » est toujours vivant et observé ce mois-ci au jardin des plantes de Paris, il détient le record de longévité des corneilles baguées dans ce étude !

Or les corneilles baguées à Paris sont mobiles (jusqu’aux Pays Bas nous dit-on !). Vous pouvez les rencontrer un peu partout en Île-de-France et même au-delà. Ouvrez l’œil, vous pourriez croiser des corneilles avec de jolies bagues aux pieds. Si c’est le cas indiquez le sur le site dédié au suivi de ces corneilles, vous produirez ainsi de précieuses informations !

Corneille noire, Corvus corone © CACP – Gilles Carcassès

Près de 10 ans d’étude, environ 1000 oiseaux bagués et suivis et quelques centaines de pages de publication plus tard ce travail a apporté des réponses aux questions posées plus haut. Sans avoir la prétention de résumer les propos des chercheurs ici, voici quelques-uns des apprentissages que l’on trouve dans leurs conclusions.

Oui, les corneilles se nourrissent dans les poubelles. Equarisseurs naturels au régime omnivore ces oiseaux ingénieux se nourrissent de tout et surtout de ce qui est facile à récupérer (comment les en blâmer ?). Alors un morceau de fritte apparent dans un sac en plastique transparent est un appât à forte attraction. S’il existe des design de corbeilles évitant que les corneilles éventrent les sacs en plastique pour récupérer le précieux butin et répandent le contenu de la poubelle au sol, rappelons tout de même qu’en ce début d’année 2024 le tri des biodéchets est devenu obligatoire. Ainsi ce fameux morceau de fritte n’a rien à faire dans la corbeille de rue mais doit rejoindre le tas de compost. Problème résolu ?

Concernant les questions agricole et des espaces verts je vous laisse découvrir le détail des expérimentations et conclusions dans les publications du Muséum. Sachez toutefois que oui, les corneilles mangent les graines de maïs fraichement semées et les larves de hanneton cachées sous la pelouse mais qu’il existe des techniques de gestion des espaces qui réduisent fortement leur impact et évitent d’avoir à replanter la pelouse toutes les semaines ou de perdre la moitié de la production du champs de maïs. A noter : le tir, le piégeage et la destruction des corneilles ne font pas partie des techniques efficaces … A méditer.

Corneillon © CACP – Matthieu Delagnes

Enfin, concernant les « attaques » de corneilles l’étude attentive des faits montrent qu’il s’agit dans des cas très rares d’individus élevés par des humains et ayant pris de mauvaises habitudes ; dans les principaux cas ce sont des tentatives d’effarouchement faites par des adultes protégeant des petits. Comme tout bon parent responsable, les corneilles n’aiment pas voir des grosses bêtes roder autour de leur progéniture.

Un rappel : ces fameux corneillons ne sont que très rarement à l’abandon. Ils sont en général en attente du retour de leurs parents partis en quête de nourriture. A moins qu’ils ne soient dans une situation visiblement dangereuse (sur le trottoir ou la chaussée par exemple) évitez d’intervenir. L’étude aura également montré que les corneillons élevés en centres de sauvetage ne survivent pas à leur première année dans le monde sauvage. Mieux vaut les laisser s’instruire auprès de leurs parents.

Corneille noire, Corvus corone © CACP – Emilie Périé

A nous aussi les corneilles ont encore beaucoup à enseigner…

Sources :

Vivent les corneilles, un plaidoyer pour une cohabitation responsable par Frédéric Jiguet aux éditions Actes Sud

Site de l’étude : suivi des corneilles parisiennes

Retrouvez d’autres histoires de corneilles dans ces articles :

Maître corbeau

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Les corneilles du château de Versailles

Bébé corneille

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Bébé corneille

Bravo à  Anne, Lucas et Murielle, qui ont réussi à  percer le mystère ! C’était en effet une corneille juvénile.

Corvus corone juvénile – Eragny-sur-Oise © CACP – Matthieu Delagnes

La corneille noire est un grand oiseau très commun de la famille des CORVIDAE. Elle est sédentaire sur notre territoire et niche dans les hauteurs des grands arbres. Son régime alimentaire se constitue principalement d’insectes, de vers de terres et de petits vertébrés, elle se nourrit également de carcasses d’animaux.

Corvus corone – © CACP – Emilie Périé

Qui est qui ?

Cet oiseau est souvent confondu avec un de ses proches cousins, le corbeau freux (Corvus frugileus), en effet il peut s’avérer difficile de les différencier l’un de l’autre lorsqu’ils sont en vol ou à  longues distances. Mais au moins deux types de critères sont importants à  prendre en compte, l’habitat où l’oiseau est rencontré et son physique.

Corvus corone – Pontoise © CACP – Gilles Cracassès

Concernant l’habitat, la corneille noire est habituée aux milieux ouverts et semi-ouverts comme les champs, les petits boisements, les parcs, les grands jardins…, alors que le corbeaux freux favorise essentiellement les champs cultivés et les grandes plaines. Pour le physique il existe un important critère déterminant, le bec. La corneille possède un bec arqué et complètement noir tandis que le corbeau a un bec pâle/gris clair à  la base et bien droit.

Corvus frugileus – Achères © CACP – Gilles Carcassès

Au vu de la raréfaction des grandes zones ouvertes et des vastes champs cultivés, il peut se montrer assez compliqué d’observer des corbeaux freux, au contraire de la corneille qui est assez abondante.

Pas d’inquiétude…

Corvus corone juvénile – Eragny-sur-Oise © CACP – Matthieu Delagnes

Pour en revenir à  notre corneille juvénile, il faut savoir qu’il est fréquent d’en trouver courant juin/juillet, perchés dans des arbres ou arbustes sans qu’ils ne bougent de trop pendant de longues périodes. En effet les jeunes, bien qu’ils soient pour certains déjà  capables de voler, sont accompagnés et nourris par leur parents pendant un certain temps après avoir quitté le nid. Donc aucune inquiétude dans le cas où vous en croiseriez un qui ne bouge pas de son perchoir, il ne fait qu’attendre le retour de ses parents pour avoir de quoi se remplir l’estomac.

Sources :

Guide Delachaux : Le guide orintho

Oiseaux.net : Le corbeau freux, la corneille noire.

Retrouvez ici d’autres oiseaux de la famille des CORVIDAE :

Le geai des chênes

La pie bavarde

Le choucas des tours

L'actualité de la Nature, L'actualité des jardins

Les corneilles du château de Versailles

Au château de Versailles © CACP – Gilles Carcassès

Que fait-elle perchée sur le bras de Latone, cette corneille noire ? Guetterait-elle les miettes de gâteaux des visiteurs, étonnamment nombreux en cette fin novembre ? Mon guide me dit qu’elle digère, en profitant du point de vue.

Corvus corone, la corneille noire © CACP – Gilles Carcassès

Celle-ci se livre à  un drôle de manège : elle cherche les bulbes de narcisses que les jardiniers ont planté dans ce massif et les arrache un à  un avec son bec ! Le bulbe qu’elle vient d’extirper a roulé dans le caniveau en pavés de grès.

Bulbe de narcisse sorti de terre © CACP – Gilles Carcassès

Veut-elle en manger les jeunes racines, ou cherche-t-elle des insectes intéressés par ces bulbes ? Ce n’est peut-être qu’un jeu après tout… Je crois ces oiseaux suffisamment intelligents pour cela !

Ma promenade se poursuit au Potager du Roi où toutes les cultures maraîchères mais aussi fruitières sont conduites en bio. J’interroge le responsable du site : quels ravageurs impactent le plus vos cultures ? Les doryphores ? Les carpocapses ? Les pucerons ? Non non, ce sont des oiseaux.

Je crois deviner : ces intrépides corneilles ? Les pigeons ramiers ? Les étourneaux ? Non, ce sont les perruches à  collier : elles arrivent par centaines et dévorent absolument tout. Aucun fruit mà»r ne leur échappe, ces oiseaux sont une catastrophe pour notre verger !

Retrouvez nos articles :

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Maître corbeau

Elevée à  la baguette

L’invasion de la perruche à  collier

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Maître corbeau

Corneille noire - Cergy © Gilles Carcassès
Corneille noire (Corvus corone) – Cergy © Gilles Carcassès

Maître corbeau, sur un arbre perché, tenait en son bec un fromage ? Non, un croissant industriel à  l’huile palme… Que voulez-vous, il faut vivre avec son époque : c’est de nos jours beaucoup plus facile de récupérer un croissant tombé sur le chemin de l’école qu’un camembert.

Et d’ailleurs en ville, maître corbeau est une corneille. C’est même l’un des oiseaux les plus fréquents sur notre territoire. Elle arrive en septième position de nos comptages d’oiseaux en avril 2015 à  Cergy-Pontoise, après le pigeon ramier, l’étourneau, le merle noir, la pie, la mésange charbonnière et le moineau domestique.

Le corbeau, le vrai, est un oiseau plus campagnard et plus farouche. J’en ai croisé quelques-uns dans un centre équestre à  Achères. On le reconnaît à  son bec plus clair.

Corbeaux freux - Achères © Gilles Carcassès
Corbeaux freux (Corvus frugilegus)- Achères © Gilles Carcassès

corneille leucique © Gilles Carcassès
Corneille noire leucique © Gilles Carcassès

Parfois, nos corneilles des villes ont les plumes un peu décolorées : encore une histoire de boulangerie…