L’agrion élégant est une demoiselle (de l’ordre des odonates) assez commune dans la région. On l’observe en été essentiellement autour des points d’eau. En effet, les larves sont aquatiques et les adultes, qui volent d’avril à septembre à la recherche de moucherons pour se nourrir et de partenaires pour se reproduire, restent à proximité des plans d’eau pour y pondre.
L’agrion élégant n’étant pas le seul agrion à parcourir nos zones humides voici quelques critères pour le reconnaître :
Belles demoiselles
L’agrion élégant, ou Ischnura elegans, porte bien tous ses noms. Le terme agrion vient du latin [agrios] qui signifie farouche ou sauvage, et Ischnura veut dire « fin, allongé ». On visualise bien l’abdomen fin de ces demoiselles voletant furtivement aux abords des points d’eau. Quant à « élégant », l’adjectif lui a sans doute été attribué en raison de la multitude de couleurs que peut revêtir cette libellule. Voyons le panel qu’elle nous propose.
Les mâles
On reconnaît le mâle car le ptérostigma est bicolore. La tache caudale et les yeux sont bleus et le thorax est bleu chez les adultes et vert chez les immatures.
La femelle
C’est la femelle qui, malgré des ptérostigmas uniformes, présente la plus grande variété de couleurs. Les immatures peuvent avoir le thorax orange, rose ou lilas avec une tache caudale bleue. Les adultes ont des thorax bleus ou vert-brun avec une tache caudale bleue ou brune. De quoi varier les nuances des mares et étangs sur lesquelles elles viennent pondre !
De quelle couleur seront les petits de ces deux-là ?
La SFO, l’OPIE et Natureparif organisaient samedi 13 février 2016, les rencontres odonatologiques d’Ile-de-France, où une quarantaine de professionnels et d’amateurs naturalistes étaient venus échanger sur les observations 2015, s’entretenir avec les autres participants ou présenter les résultats de leurs travaux.
Avec la création de CETTIA il y a 3 ans (portail de saisie en ligne des données naturalistes) et la mise en place de l’atlas des libellules d’Ile-de-France début 2015, les résultats de l’année écoulée sont intéressants : 127 observateurs ont fait remonter plus de 7000 données et sur les 60 espèces d’odonates d’Ile-de-France, 57 ont été observées.
L’après-midi, une grande partie du groupe s’est attelée à la détermination d’exuvies (mues rigides laissées par les larves lors de leur transformation en adultes). Ce fut l’occasion pour moi de déterminer enfin les petits squelettes récoltés en Aoà»t 2014 au bord du bassin du parc François-Mitterrand à Cergy.
Un masque en cuillère sans sillon apparent, de beaux yeux globuleux, des épines dorsales sur l’abdomen… Alors qui est-ce ? Après une observation détaillée, il s’agit de Sympetrum fonscolombii que nous avions déjà identifié au stade adulte le 15 Juin 2014.
La recherche d’exuvies lors des prospections de terrain est très pertinente. Ces dernières permettent non seulement d’attester de la présence certaine de l’espèce sur le site car elles sont le signe indéniable de sa reproduction, mais aussi de vérifier la fiabilité de la détermination du taxon.
Les libellules étaient le sujet d’étude d’une quinzaine d’animateurs nature franciliens, réunis à l’invitation de Natureparif le 28 mai 2015 à l’Ile de Loisirs de Cergy-Pontoise.
Chez les odonates, on distingue très facilement deux sous-ordres :
Les demoiselles ou zygoptères ont l’apparence de fines allumettes volantes. Leurs ailes sont jointes sur le dos au repos. Leurs yeux ne se touchent pas.
Les libellules vraies ou anisoptères regroupent les grandes « libellules » au vol puissant. Plus larges et trapues que les premières, leurs ailes antérieures et postérieures ne sont pas identiques. Lorsqu’elles sont posées (ce qui est rare pour celles qui chassent en vol), leurs ailes sont positionnées à l’horizontale ou vers l’avant.
L’observation des libellules peut avoir lieu pendant une grande partie de l’année (entre avril et octobre) à proximité des points d’eau où elles se reproduisent (mares, étangs, ruisseaux, marais…) Mais certaines périodes et certains endroits sont plus propices que d’autres. Pour préparer votre sortie exploratoire, préférez :
Une météo ensoleillée et un vent faible,
La présence d’une végétation rivulaire et aquatique dense,
Un matin, période favorable aux émergences. L’émergence est la dernière mue pendant laquelle l’individu passe du milieu aquatique au milieu terrestre.
Quelques connaissances sur leur biologie et leurs comportements sont également nécessaires pour une exploration réussie (période d’accouplement, exigences particulières) : certaines espèces sont inféodées à certains types de milieux alors que d’autres sont ubiquistes ; elles sont toutes dépendantes de l’eau dans leur stade larvaires.
L’émergence peut durer deux à quatre heures. A la fin de celle-ci, les téguments sont encore mous, parfois translucides. Les jeunes individus prennent un premier bain de soleil pour sécher leurs ailes mais s’écartent ensuite assez vite des points d’eau où ils ont vu le jour pour se mettre à l’abri du vent, des prédateurs et des rivaux potentiels en attendant leur maturité sexuelle. Pendant ce cours laps de temps (de quelques jours à quelques semaines), l’exosquelette se rigidifie et leurs couleurs définitives se révèlent. Ils reviendront ensuite au bord de l’eau pour s’accoupler. Les prairies, fourrés ou lisières forestières à proximité des points d’eau peuvent donc faire l’objet de nombreuses observations.
Pour améliorer vos connaissances et identifier les espèces, voici une sélection d’ouvrages :
Guide des libellules de France et d’Europe (Delachaux et Niestlé)
Les libellules de France, Belgique et Luxembourg (collection Parthénope, éditions Biotope)
Cahier d’identification des libellules de France, Belgique, Luxembourg et Suisse (éditions Biotope)
Attention, les espèces protégées ne peuvent être capturées sans autorisation spécifique et les individus immatures sont extrêmement fragiles. La pratique de la macrophotographie apparait dans bien des cas suffisante pour la détermination de l’espèce.
Au sein de la colossale communauté des insectes, l’ordre des Odonates est une bien petite entité : 102 espèces en France pour près de 8000 espèces d’hyménoptères et 9600 espèces de coléoptères.
Voici quelques portraits tirés d’une exploration à l’Ile de loisirs de Cergy-Pontoise, le 28 mai 2015, lors d’une formation organisée par Natureparif :
Platycnemis pennipes – agrion à larges pattes
Comme son nom l’indique, les tibias de cette demoiselle sont fortement élargis. Deux bandes claires se dessinent également sur les côtés de son thorax.
Les principaux critères d’identification des odonates, souvent visibles à l’œil nu, sont accessibles aux débutants (la couleur et les motifs de l’abdomen et du thorax, la couleur et l’écartement des yeux…). Avec seulement 59 espèces recensées en Ile-de-France, la détermination c’est donc du gâteau pour les novices ?
Pas si sà»r, c’est compter sans le dimorphisme sexuel et la variabilité chromatique au sein d’une même espèce, notamment selon l’âge de l’individu. Ainsi, si les mâles adultes sont assez facilement identifiables, l’affaire se complique dès que l’on croise une femelle ou un individu immature.
Ischnura elegans – agrion élégant
Le dimorphisme sexuel s’exprime principalement par la couleur qui est, en général, plus vive chez les mâles. Cependant, chez certaines espèces, la couleur de la femelle peut être identique à celle du mâle. Ces femelles dites andromorphes sont fréquentes chez les caloptéryx et dans la famille des coenagrions (notamment chez Ichnura elegans).
Chez les femelles d’Ischnura elegans, il existe aussi des variations importantes de coloration au niveau du thorax.
Chez Calopteryx splendens – calopteryx éclatant,le corps du mâle est bleu-vert métallique.
L’espèce se distingue par la position et la taille de la barre bleue-nuit qui opacifie ses ailes arrondies. Cette tache concerne la partie centrale de l’aile sans aller jusqu’aux extrémités qui restent translucides. Les femelles sont vert bronze avec des ailes verdâtres et légèrement fumées.
Les femelles de caloptéryx peuvent s’immerger totalement dans l’eau pour aller pondre. Les caloptéryx sont des demoiselles typiques des bords d’eau courante.
Enallagma cyathigerum – agrion porte-coupe
Le dessin du deuxième segment abdominal représente une coupe posée sur un socle (ou un champignon) chez le mâle. Chez les deux sexes, la suture du milieu des flancs du thorax est dépourvue de noir.
Orthetrum cancellatum – orthétrum réticulé
Celui-ci n’est pas une demoiselle, c’est un représentant des anisoptères. Ce jeune Orthetrum reticulatum mâle vient d’émerger. Les ptérostigmas noirs sont caractéristiques de l’espèce mais il n’a pas encore l’abdomen bleu de l’adulte (l’abdomen restera jaune et noir chez les femelles). L’absence de tâches noires à la base de l’aile permet de le distinguer de la libellule fauve (Libellula fulva).
Chez les anisoptères (les grosses libellules), les yeux sont particulièrement développés et se rejoignent plus ou moins. La nature de leur jonction est leur premier critère d’identification. Chez les Gomphidae, les yeux sont largement séparés l’un de l’autre. A l’inverse, chez les Aeshnidae ils sont jointifs.
La liste rouge régionale des libellules d’Ile-de-France est parue. Cette mine d’informations sur les odonates et leur protection est aussi un bien bel ouvrage avec des illustrations de qualité sur les espèces rares. Vous pouvez la télécharger sur le site de Natureparif.
Nous sommes autour des bassins du parc François Miterrand, dans le quartier Grand centre à Cergy-Pontoise. Pendant que les canards colvert se pâment au soleil, les odonates s’activent entre les feuilles des massettes et des joncs : émergences, échauffourées, accouplements, alimentation. Autant d’agitation et de passions discrètes mais bien visibles si on se donne la peine d’observer.
D’une grande voracité, les odonates chassent à l’affà»t ou par poursuite de nombreux petits insectes. Mais, quelquefois, des araignées, des abeilles et même d’autres odonates peuvent entrer dans leur régime alimentaire. Ils ont un arsenal bien développé pour la capture des proies : une technique de vols remarquablement efficace, des yeux à facettes permettant une vision à 360°, des pattes préhensibles, des mandibules puissantes.
Quant aux plantes de la zone humide, elles fleurissent tour à tour sur le pourtour des bassins : aux jaunes de cobalt des iris et des mimules ont succédé le fuchsia des salicaires, le rose tendre des ombelles des butomes ou des épilobes à petites fleurs, le bleu azuréen des myosotis des marais…
Elles n’auront pas attendu l’inauguration pour investir les lieux. Agrions, naà¯ades, anax et sympetrums se disputent âprement leur nouveau territoire. Une véritable aubaine : les bassins du parc François-Mitterrand près de la préfecture à Cergy viennent d’être renaturés et les espèces pionnières sont déjà là par dizaines.
Mais d’où viennent-elles, demanderez-vous ? Pour la plupart, elles sont nées sur place ! Les colons arrivés au printemps sont passés inaperçus. La première génération éclot maintenant en masse et les adultes se mettent aussitôt en quête de partenaires pour assurer la génération suivante.