Voici un petit hanneton, d’une espèce très commune, croisé sur un chêne à côté de l’université à Neuville. Ce hanneton des jardins (Phyllopertha horticola) vole en mai et en juin. On reconnaît cette espèce à la couleur verte métallisée de sa tête et de son thorax.
La biologie du hanneton des jardins
Le cycle de Phyllopertha horticola est annuel. Les femelles pondent au sol en été. Les larves consomment des racines de plantes herbacées : céréales, trèfles, gazons…
La nouvelle génération émerge dès le printemps suivant (elle ne reste pas en terre deux ou trois ans comme les autres espèces de hannetons). Les adultes grignotent les feuilles des églantiers et des chênes, noisetiers, bouleaux, généralement sans faire beaucoup de dégâts.
Les friches sèches installées sur les sols sableux près de l’Université à Neuville-sur-Oise sont propices au Collier-de-corail. Ce joli papillon de la famille des Lycaenidae y trouve en abondance les Erodium cicutarium (photo ci-dessous) que consomment ses chenilles. Celles-ci sont soignées par des fourmis de plusieurs espèces qui consomment leurs sécrétions et les protègent des parasitoà¯des et des petits arthropodes prédateurs.
Comment le reconnaître
Sur cette photo, c’est un couple qui se forme. La femelle (à droite) a l’abdomen plus rebondi et les taches orange sont plus grandes. La marque noire au milieu de l’aile antérieure est également plus grande. L’abdomen du mâle est plus fluet, il atteint l’extrémité des ailes et se termine par un pinceau de poils. Chez les deux sexes, les lunules orange sont bien nettes et établies jusqu’à l’avant de l’aile antérieure, ce qui n’est pas le cas chez la femelle de Polyommatus icarus (l’argus bleu) avec laquelle on peut les confondre.
En Ile-de-France, on voit voler deux générations de ce papillon : en mai et en juillet-aoà»t.
Les inventaires éclairs organisés par Natureparif sont le grand rendez-vous de terrain des naturalistes franciliens. Pour le pique-nique du dimanche 14 mai 2017, les participants avaient investi une vaste prairie sèche à Jeufosse avec un joli point de vue sur la vallée de la Seine.
Une larve inconnue
A mi-sandwich, je remarque un attroupement. Quelqu’un a trouvé dans l’herbe une drôle de larve.
Les experts se consultent : ce serait une larve de cigale, du genre Cicadetta et du groupe d’espèces montana. Après une séance photos digne du festival de Cannes, il est décidé de la remettre dans l’herbe.
Rapidement, la larve entreprend l’escalade d’une tige sèche. Normal pour une larve de cigale : après deux ans passés sous terre à ronger des racines, le moment est venu de se nymphoser.
L’ascension semble terminée. A une vingtaine de centimètres du sol, la larve s’immobilise et se transforme en nymphe. Comme il ne se passe plus rien, je retourne à mon sandwich.
Je reviens après ma banane, et quelques bavardages. La cuticule du dos de la nymphe s’est déchirée, l’adulte s’en est extrait et prend une posture acrobatique. Les ébauches d’ailes de notre cigale ne sont pas encore déployées. Entre ses pattes avant, on aperçoit le rostre avec lequel elle aspirera la sève des arbres pour se nourrir.
Je repasse dans l’après-midi pour voir l’évolution de cette émouvante métamorphose. Cela commence à ressembler à une cigale ! Elle a encore besoin de quelques heures sans doute pour sécher, ainsi accrochée à son exuvie, durcir ses ailes puis prendre son envol. Je l’abandonne à regret, pour rejoindre un groupe motivé qui part fouiller dans des bouses de vache à la recherche de fabuleux coléoptères coprophages…
Quelle Cicadetta ?
Il existe six espèces de Cicadetta en France. En l’occurrence, nous avons peut-être affaire à Cicadetta cantilatrix, la cigale fredonnante. Cette espèce a été découverte en 2007 lors de prospections entomologiques dans la Réserve Naturelle Nationale des coteaux de la Seine, pas très loin de Jeufosse. On ne peut la distinguer des autres espèces de Cicadetta que par l’analyse du chant du mâle, faible et très aigu (un truc pour attirer les femelles). Autrement dit, il faudra revenir sur les lieux de la découverte, avec de bonnes oreilles, pour espérer l’identifier.
Cette bestiole étrange de 5 mm trottait sur le tronc d’un arbre, derrière le centre des impôts à Cergy. Sa silhouette trapue est caractéristique d’un Issus, de la toute petite famille (en France) des Issidae, parmi les homoptères. Sans doute l’espèce la plus commune de ce genre : Issus coleoptratus.
Ils ne volent pas mais ils courent vite
Les Issus ne volent pas, ils courent… Effectivement, j’ai du faire plusieurs fois le tour de ce platane pour arriver à photographier cet insecte qui avait la bougeotte. Les Issus se nourrissent de la sève de diverses espèces d’arbres et d’arbustes à l’aide de leur rostre, comme le font les cigales. Stridulent-ils ? Rien n’est moins sà»r. En tout cas rien d’audible pour l’oreille humaine, sinon on le saurait. Car l’insecte, s’il est discret, est somme toute assez largement répandu.
Yves Leguen, jardinier à la ville de Pontoise, a trouvé dans son jardin sur le rebord de sa fenêtre ce magnifique papillon. Il s’agit du grand paon de nuit, Saturnia pyri. Avec son envergure impressionnante de 10 à 15 centimètres, c’est le plus grand des papillons européens.
Celui-ci est un mâle, reconnaissable à ses antennes pectinées qui lui servent à détecter les effluves des femelles de son espèce à plusieurs kilomètres de distance. Ces papillons ne s’alimentent pas et ne vivent que quelques jours, juste le temps nécessaire pour s’accoupler et se reproduire.
Au dernier stade de sa croissance, sa chenille de 12 centimètres de long, verte à tubercules bleus et aux longs cils noirs, est digne d’Alice au pays des Merveilles. Elle consomme des feuilles d’arbres fruitiers comme les pommiers, poiriers, abricotiers, amandiers et s’intéresse aussi aux frênes, aubépines, prunelliers…
Les participants ont été épatés par la beauté du parc de Grouchy et la richesse des observations que l’on peut y faire. Nous avons ainsi croisé deux espèces d’orchidées : la listère à feuilles ovales et l’orchis pourpre.
La visite a aussi permis d’apprendre à reconnaître le chant de certains oiseaux : merle, rouge-gorge, pinson, fauvette à tête noire, mésange à longue queue, troglodyte mignon, poule d’eau…
La longue-vue a été très pratique pour observer les papillons sans les déranger. Un Tircis se dorait au soleil à quelques mètres du groupe et nous avons pu le détailler de façon très rapprochée. Près d’un massif d’orties, la Carte géographique s’est aussi laissé longuement admirer.
Vendredi 19 mai 2017 au parc du château de Menucourt, une animation sur les chauves-souris proposée par la Ferme d’Ecancourt
Après les jeux animés par Florian dans l’orangerie, le groupe motivé a affronté la pluie et cheminé à l’écoute des bruits de la nature dans le parc éclairé par les derniers rayons du soleil couchant.
Les insectes s’étaient mis à l’abri, comme cette tenthrède débusquée sous une large feuille de bardane. Les chauves-souris finalement se sont montrées en nombre, plus tard dans la soirée après l’averse.
Samedi 20 mai 2017, un rendez-vous nature organisé par les animateurs de l’Ile de loisirs de Cergy-Pontoise
Les personnes inscrites ont bénéficié des explications de Sylvain et Ludovic sur l’apiculture. Marion a ensuite présenté notre dernière exposition sur les insectes pollinisateurs, préparée par Corentin notre stagiaire (ci-dessous, un des six panneaux) :
Sur les cornouillers sanguins en fleurs, le groupe a pu observer la grande diversité des visiteurs ailés : abeilles, mouches, bourdons, coléoptères…
J’ai vu ces jours-ci des viornes obiers totalement défeuillées. C’est l’oeuvre des larves de la galéruque de la viorne, un coléoptère de la famille des Chrysomelidae. Ces larves sont ornées de taches caractéristiques en forme de traits et de points noirs.
La même espèce peut faire de gros dégâts sur le laurier-tin, espèce méditerranéenne fréquemment employée en espaces verts, car c’est également un Viburnum. Elle s’attaque aussi parfois à la viorne lantane, espèce indigène en Ile-de-France, commune en lisière des bois sur sol calcaire.
Dimanche 14 mai 2017, j’ai participé aux inventaires éclairs de biodiversité organisés par Natureparif.
Les inventaires éclairs 2017 à Jeufosse et Port-Villez
Cette année, cela se passait à Jeufosse et Port-Villez, dans les Yvelines. Jeufosse ? Facile : c’est sur la route de Blaru, en venant de Predreauville.
Le principe des inventaires éclairs est simple, on réunit une centaine de naturalistes passionnés et d’experts patentés, on leur distribue quelques victuailles pour assurer leur survie et on les lâche 48 heures dans la nature, par équipes, avec pour mission d’inventorier le territoire. Les oiseaux, les plantes, les insectes, les chauve-souris, les escargots… tout doit y passer !
Les étudiants en BTS « Gestion et Protection de la Nature » ont fait connaissance avec leurs ainés déjà dans la carrière ; les amateurs se sont frottés avec gourmandise aux éminents spécialistes.
Quelques belles trouvailles
J’ai le plaisir de partager avec vous quelques moments d’intenses émotions :
Au bord des bassins d’infiltration des eaux pluviales derrière l’Université à Neuville-sur-Oise, on trouve de beaux massifs de tanaisie. Cette plante vivace vigoureuse, à la forte odeur camphrée, a la solide réputation de repousser les insectes. Nos aà¯eux en plaçaient dans la litière, au chenil et au poulailler, pour combattre les parasites. On trouve sur internet quelques recettes pour soigner les plantes à base de tanaisie, mais cette espèce contient des composés toxiques pour l’Homme et pour cette raison elle n’a pas été homologuée comme substance de base par la Commission européenne. Elle n’est pas non plus dans le dernier tableau des produis de biocontrôle (version du 28 mars 2017). Aussi, je ne recommande pas son usage.
Un drôle d’insecte est capable de résister à son arsenal chimique. Sa forme en bouclier fait penser à une punaise, mais c’est un coléoptère, de la famille des chrysomèles. Il arbore le même vert franc que sa plante de prédilection : très discret, il n’est pas facile à observer.
J’ai retourné la bête pour vous montrer comment elle peut se cacher entièrement sous sa carapace.
Les cassides sont souvent joliment colorées. En Ile-de-France, on peut chercher Cassida murraea (rouge ou verte, tachée de noir) sur les pulicaires, Cassida azurea (bleue) sur les saponaires, Cassida viridis (verte) sur les menthes, Cassida vibex (verte et brune) sur les chardons… En tout, 38 espèces de cassides du genre Cassida sont répertoriées en France.
Quel est donc ce lourd coléoptère, incapable de voler, qui traverse mollement l’allée forestière ? Il est mal fagoté, avec ses élytres qui couvrent à peine la moitié de son abdomen. C’est un méloé, et à son embonpoint je suppose que c’est une femelle prête à pondre. Après l’accouplement, elle dépose ses œufs par milliers dans le sol, puis les petites larves grimpent dans les fleurs de plantes basses comme les pissenlits. On rencontre aussi souvent des larves de cette famille dans les fleurs de ficaire ou d’anémone.
Là se joue le mystère de la vie : avec leurs pattes terminées par des griffes en trident, ces larves, que l’on nomme triongulins, s’agitent à l’arrivée d’un butineur et s’agrippent aux poils des abeilles sauvages de passage. Elles voyagent sur le dos de leur hôte, parfois en groupe serré, jusqu’au fond du terrier de l’hyménoptère. Là , le triongulin mange l’oeuf de son hôte et entame une série de mues, se transformant en une larve dodue qui va dévorer les réserves de miel. Etonnant, non ?
Mais il y a plus fort encore : il paraît que les triongulins d’un méloé américain savent attirer par une phéromone spécifique les mâles d’une espèce d’anthophore. Les triongulins grimpent sur ces visiteurs et ainsi véhiculés profitent des accouplements pour changer de monture et finalement contaminent le terrier des femelles.
Inquiété, le méloé fait sourdre par ses articulations un liquide malodorant, vésicatoire et toxique, à base de cantharidine. Sa toxicité lui vaudrait son surnom d’enfle-boeuf et une réputation sulfureuse d’aphrodisiaque. Sa consommation serait très dangereuse pour les reins, aussi je déconseille vivement de croquer l’animal !