L'actualité de la Nature

Retenir les chants des oiseaux

Loriot mâle - dessin de José Keravis
Loriot mâle – dessin de José Keravis

J’ai cru entendre un loriot sur les hauteurs de Vauréal. Ca m’a rappelé ma jeunesse. La cousine de mon grand-père me racontait qu’autrefois tout le monde à  la campagne comprenait le chant des oiseaux et que ceux-ci chantaient en occitan.

Ecoutons la cousine :

Le paysan, à  la vigne depuis le lever du soleil, ouvre son panier pour sortir sa collation de 10 heures. Sa femme lui a préparé un bon morceau d’omelette. Le loriot, jamais avare de remarques sur la nourriture, siffle : « Biro l’iou. Biro l’iou. Se l’avio, lou biraio ! » (Retourne l’œuf. Retourne l’œuf. Si je l’avais, je le retournerais ! »). Et s’il n’y a pas d’omelette, le gourmand entonne : « Son maduras las cerièsas ? Se n’aviai, ne manjariai ! » (Elles sont mà»res les cerises ? S’il y en avait, j’en mangerais ! »).

Les paysans modernes, avec le bruit des tracteurs, ont perdu ce contact intime avec les oiseaux dont le chant rythmait les journées de labeur de leurs aà¯eux. Leurs conversations leur faisaient une compagnie. Et ils écoutaient leurs sages conseils : « Paie tes dettes, paie tes dettes ! » disait la caille des blés.

Aujourd’hui, il n’y a plus guère que les ornithologues pour s’intéresser à  ces mimologismes. Moi qui les fréquente, je peux vous assurer qu’à  Cergy-Pontoise, les oiseaux sédentaires chantent en français. Perché sur son grand arbre, le pigeon ramier assoiffé ne répète-t-il pas inlassablement « Paye ton coup, tonton !… » ? Il n’est pas le seul à  avoir soif, le pic vert appelle la pluie : « Pleut ! Pleut! Pleut! Pleut ! ».

Bruant jaune - Emberiza citrinella © Gilles Carcassès
Bruant jaune – Emberiza citrinella © Gilles Carcassès

Pour le bruant jaune, un peu bellâtre, rien de plus facile, il chante : « Je suis le bruant jooooone ». Et l’insouciante fauvette à  tête noire : « Allons donc, il fait beau, faut sortir ! ». Quant au pinson, qu’est-ce qu’il fringote mille fois par jour ? « Dis, dis, veux-tu que je t’estropie, mon p’tiot ? ». D’accord, ça n’a pas beaucoup de sens, mais on ne va pas exiger un discours d’académicien d’une si petite cervelle…

Cet article a été publié le 9 avril 2016 dans le numéro Hein??? du journal « Dur de la feuille », créé dans le cadre de la manifestation Traits bruyants à  Cergy-Pontoise.

La vidéo de l’inauguration de Traits bruyants par la Communauté d’agglomération de Cergy-Pontoise