Ce soir-là , par un froid de canard, un équipage de galériens faisait des longueurs à la rame au fond du grand étang de l’Ile de loisirs de Cergy-Pontoise, sous les aboiements d’un coach motorisé. Ce manège peu discret ne semblait pas trop impressionner les grèbes huppés (au premier plan dans la photo ci-dessus) ni les mouettes rieuses rassemblées en nombre au centre de l’étang pour y passer la nuit. Un groupe serré de trois petits canards a attiré mon attention.
Le reflet du soleil sur une aile m’a envoyé un signal vert émeraude bien net : à cet indice, je me forge une conviction, ce sont des sarcelles d’hiver. Ces plumes irisées forment ce que l’on appelle le miroir alaire. A chaque espèce de canard, sa couleur : miroir bleu pour les colverts, vert pour les sarcelles d’hiver, blanc pour les chipeaux… C’est là un signe de reconnaissance entre individus de la même espèce, utile pour ne pas se tromper de femelle à la saison des amours. Et c’est bien commode pour les ornithologues.
Quelques ruses de sioux plus tard, j’ai pu m’approcher un peu pour prendre cette photo. Bizarre, le miroir paraît bleu. Aurai-je la berlue ? On m’explique que ce sont là des couleurs d’irisation, et qu’elles peuvent varier selon l’incidence de la lumière. Les spécialistes sont formels, car les autres critères ne mentent pas : le bec sombre, les grands motifs sur les flancs, la forme de la tête, les proportions générales : ce sont bien des sarcelles d’hiver. Des femelles bien sà»r, car les mâles sont beaucoup plus colorés. L’ornithologie est une science difficile…
Je n’avais encore jamais vu de sarcelles d’hiver à l’Ile de loisirs. D’habitude, en cette saison, je les observe plutôt sur la Seine. Leur présence m’a fait plaisir ; je les trouve bien jolis ces petits canards.