Le ministère de l’Environnement a publié mercredi 4 janvier 2017 le « guide des solutions » à l’usage des communes, qui ont l’obligation depuis le 1er janvier 2017, en vertu de la loi Labbé, de s’abstenir d’utiliser des produits phytosanitaires de synthèse.
Je vous recommande particulièrement la lecture du chapitre 3 intitulé « LA LOI MODE D’EMPLOI » qui répond aux questions techniques des jardiniers. C’est à partir de la page 34 du guide.
On y apprend notamment que « les cimetières et les terrains de sport ne sont concernés par l’interdiction que s’ils font l’objet d’un usage de « promenade » ou d’ « espace vert » avéré. Ces espaces nécessitent donc une appréciation au cas par cas pour déterminer s’ils font l’objet d’un usage de « promenade » ou d’ « espace vert » avéré et s’ils entrent ainsi dans le champ de la loi. »
On y trouve aussi tous les liens utiles vers les listes des produits encore autorisés.
C’était la dernière pièce manquante pour l’application de la loi Labbé : la liste des produits de biocontrôle que les jardiniers pourront utiliser. Et pour les jardiniers professionnels, il était temps, l’interdiction d’utilisation des produits phytosanitaires sur les espaces verts, voiries, promenades et forêts s’appliquera à partir du 1er janvier 2017.
Le Ministère de l’Agriculture a émis le 3 novembre 2016 une note de service d’application immédiate, avec en annexe la liste des produits de biocontrôle tant attendue. Cette liste classée par substances actives et spécialités commerciales s’articule en trois groupes de produits :
« les produits phytopharmaceutiques de biocontrôle comprenant des micro-organismes »
On y trouve bien sà»r les différentes souches de Bacillus thuringiensis, utiles pour lutter contre les chenilles processionnaires ou la pyrale du buis, par exemple.
« les produits phytopharmaceutiques de biocontrôle comprenant des médiateurs chimiques comme les phéromones et les kairomones »
Les pièges à phéromones, qui associent des phéromones pour attirer des insectes ravageurs à une substance insecticide à effet létal, rentrent aussi dans cette catégorie.
« les produits phytopharmaceutiques de biocontrôle comprenant des substances naturelles d’origine végétale, animale ou minérale »
Parmi les produits d’origine végétale, on trouve les extraits d’ail et de fenugrec, la laminarine, les pyréthrines, l’huile de colza esthérifiée, le poivre (répulsif lapins ou sangliers)… Les acides acétique et pélargonique (désherbants) ont conquis leur place dans la liste.
La liste sera actualisée au minimum tous les six mois, précise la note.
Pour connaître les usages autorisés de chacun des produits de la liste, il faut les chercher dans le site https://ephy.anses.fr/. Et là , on constate que certains ne sont homologués qu’en culture légumière, ou en viticulture, ou en grandes cultures, ou en cultures fruitières…
Rappelons que les jardiniers pourront utiliser aussi les produits utilisables en agriculture biologique et ceux à faible risques : voir notre article Les phytos, on arrête !
Jardiniers des collectivités, à compter du 1er janvier 2017, vous ne pourrez plus utiliser de produits phytosanitaires. Le détail des dispositions de la loi Labbé mérite cependant une lecture attentive, pour bien en comprendre le périmètre et les subtilités.
Qui est concerné ?
La loi vise l’Etat, les collectivités locales et leurs groupements ainsi que les établissements publics, qu’elles interviennent par les moyens de leurs régies ou par d’autres moyens, comme les services de prestataires.
Quels espaces sont concernés par cette interdiction ?
Les espaces verts, les promenades, les forêts, et les voiries sont visés par la loi.
Rappelons que restent applicables les interdictions et restrictions définies par des textes antérieurs, dans les espaces suivants :
– les plans d’eau, fossés, étangs, mares, collecteurs d’eaux pluviales, cours d’eau et leurs abords (arrêté du 12 septembre 2006),
– les espaces habituellement fréquentés par les enfants dans l’enceinte des établissements scolaires, des crèches, des haltes garderies et des centres de loisirs ainsi que les aires de jeux et les établissements de santé (arrêté du 27 juin 2011).
Quelles sont les exceptions prévues par la loi ?
Les produits de biocontrôle, ceux qualifiés à faible risque ainsi que ceux qui sont utilisables en agriculture biologique (UAB) pourront continuer à être utilisés.
Les traitements obligatoires dans le cadre de la lutte contre les organismes réglementés échappent également à ces mesures d’interdiction.
En ce qui concerne les voiries, la loi de transition énergétique dans son article 68 a introduit une exception pour les zones étroites ou difficiles d’accès, ainsi formulée : Par exception, l’utilisation des produits phytopharmaceutiques est autorisée pour l’entretien des voiries dans les zones étroites ou difficiles d’accès, telles que les bretelles, échangeurs, terre-pleins centraux et ouvrages, dans la mesure où leur interdiction ne peut être envisagée pour des raisons de sécurité des personnels chargés de l’entretien et de l’exploitation ou des usagers de la route, ou entraîne des sujétions disproportionnées sur l’exploitation routière.
Que sont donc les « produits à faible risque » ?
Les produits à faible risque sont soit des substances de base, soit des biostimulants.
Les substances de base et leurs conditions d’usage sont présentées dans le site de l’Institut Technique de l’Agriculture Biologique (ITAB). En voici deux exemples qui peuvent être utiles aux jardiniers des collectivités :
La décoction de prêle réalisée selon une recette précise est une substance de base fongicide utilisable sur certaines cultures, dont la vigne.
Le vinaigre de qualité alimentaire est reconnu comme substance de base et peut être utilisé pour désinfecter les outils de taille des arbres et arbustes.
Les biostimulants sont définis par le décret du 27 avril 2016 et une liste a été établie. Ainsi les macérations ou décoctions de plantes telles que l’ail, l’ortie, la sauge, le gingembre, les queues de cerises… sont reconnues comme des biostimulants, sans effets nocifs sur la santé des hommes et des animaux ni sur l’environnement. Et sans effets scientifiquement établis sur les plantes…
Etonnamment, cette liste contient une faute, répétée 3 fois : le févier est appelé « Gleditschia » au lieu de Gleditsia. Je vais me plaindre auprès du Monsieur pesticide du Ministère de l’Ecologie (qui n’y est pour rien).
Comment reconnaître les produits utilisables en agriculture biologique ?
On dispose, en attendant la liste officielle, d’une liste des produits de biocontrôle parue le 31 mars 2016. Mais sur 200 produits répertoriés, seulement une trentaine seraient utilisables en zones non agricoles. Lesquels ? Pour le savoir, il faut interroger pour chaque produit le site e-phy anses et vérifier que ses usages autorisés correspondent bien au besoin identifé sur espace vert.
Pour le fun, je précise que cette liste récente n’est déjà plus à jour car elle indique plusieurs produits qui ont été retirés depuis et ne sont donc plus utilisables… Mais c’est mieux que ne pas avoir de liste.