L'actualité de la Nature

Loup y es-tu ?

La presse locale (voir le dossier du Parisien du 04 12 2016) s’est faite l’écho récemment de la présence supposée de loups en Ile-de-France. Le Val d’Oise a même été placé « sous surveillance » par l’association Observatoire du loup qui estime que des déplacements aléatoires de cette espèce sont désormais possibles dans ce département.

Alerte au loup en Val d'Oise ? La cellule biodiversité veille : si on en voit un, on prévient les autorités. Pour l'instant, on n'en n'a pas vu. © Gilles Carcassès
Alerte au loup en Val d’Oise ? La cellule biodiversité veille : si on en voit un, on prévient les autorités. Pour l’instant, on n’en n’a pas vu. © Gilles Carcassès

Que nous montrent les cartes interactives de l’Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage (ONCFS) ?

Evolution de la présence du loup 2008 - 2015 (source ONCFS)
Evolution officielle de la présence du loup 2008 – 2015 (source ONCFS)

En sept ans, de 2008 à  2015, le loup a significativement consolidé sa présence dans les Alpes, le Sud du Massif central et le Grand Est. Son effectif sur le territoire national, selon une estimation de mars 2016, serait d’environ 325 individus répartis en 49 zones de présence permanente.

Arrivé d’Italie en 1992 dans le Mercantour, il a nettement progressé vers l’Ouest et le Nord. Signalé dans la Marne et l’Aube, il est effectivement à  la porte de l’Ile-de-France. Cette expansion se fait par la prospection de nouveaux territoires par des loups solitaires, parfois sur de longues distances. Lorsqu’il est installé, le loup vit en meutes familiales. Selon le dernier bulletin « loup » de l’ONCSF de septembre 2016, les meutes les plus proches de l’Ile-de-France sont dans les Vosges et le Jura. L’entrée du loup dans Paris n’est donc pas pour demain. De plus, l’animal est très craintif et fuit les zones urbanisées. D’autres populations de loups en provenance d’Europe de l’Est progressent en Allemagne. Le renforcement de la diversité génétique de l’espèce se fera peut-être à  nos frontières avec ce pays.

Sauf dans la période moderne récente, le loup a toujours vécu en France, tenant sur tout le territoire sa place très utile de charognard et de prédateur des grands mammifères sauvages, qui font aujourd’hui bien des dégâts aux cultures. On estime que 10 000 à  20 000 loups peuplaient la France à  la fin du 18ème siècle. Victimes des progrès de l’efficacité des armes à  feu, des pièges et des poisons, ils n’étaient plus que 500 en 1900. Et le dernier loup français aurait été tué en 1937 dans le Limousin.

Du 15ème au 17ème siècle, les guerres avec leurs sinistres cortèges de cadavres frais ont modifié le comportement de certains loups accoutumés à  la chair humaine. Quelques-uns, d’abord nécrophages sur les champs de bataille, sont devenus au retour des troupes dans leurs foyers, des prédateurs pour les humains vulnérables, femmes et enfants surtout. Les chroniques historiques (voir l’Homme et le loup, 2000 ans d’histoire, par l’Université de Caen) évoquent ainsi des centaines de cas d’attaques de loups, ou parfois de chiens féroces ressemblant à  des loups, concentrées dans certaines zones. Ainsi, de Versailles à  Rambouillet « la bête de l’Yveline » fit plus de 200 morts entre 1677 et 1683. A Cergy-Pontoise on eut à  déplorer deux victimes, à  Jouy-le-Moutier et Saint-Ouen l’Aumône, les 13 et 15 juin 1659. Mais n’accablez pas ces pauvres loups, les vrais responsables de ces tragédies, ce sont bien les humains avec leur folie guerrière. Des cas de rage parmi les loups furent aussi la cause d’accidents abominables, terrorisant la population.

Le loup a laissé des traces indélébiles dans la mémoire collective. J’ai testé : à  la nuit tombante, sur un chemin forestier, un farceur en ma présence a imité le hurlement du loup.  L’effet fut immédiat sur les petits enfants trainards qui revenaient des champignons devant nous : les gamins ont rattrapé illico leurs parents !